Suite à notre rencontre avec Sandrine Le Feur, députée du Finistère, celle-ci a envoyé un courrier au Ministre de l’Éducation Nationale afin de lui faire part de notre mécontentement au sujet de la prime informatique et de la méconnaissance de notre rôle d’enseignant.
La voici en copie :
A Morlaix, le 3 février 2021
Monsieur le Ministre,
Votre ministère a engagé une revalorisation salariale des enseignants, démarche hautement justifiée et attendue de longue date puisque le salaire des enseignants français est inférieur en début de carrière de 7% à la moyenne des pays de I’OCDE.
Dans ce contexte ont été annoncés: une indemnité réévaluée pour les directeurs, une prime d’attractivité jusqu’à l’échelon 7 inclus et une prime d’équipement informatique équivalente à 150 euros nets annuels.
S’il faut saluer cet effort de reconnaissance envers ceux qui éduquent et forment l’esprit, ces dispositions ne vont pas sans créer des inégalités. Les quelques 11 000 professeurs documentalistes ont ainsi eu l’amère surprise de découvrir qu’ils ne sont pas éligibles à la prime informatique.
Outre l’incompréhension qui en découle, les motifs invoqués ne passent pas. Justifier cette exclusion au motif que les enseignants documentalistes ne seraient pas des professeurs qui « sont devant des élèves » revêt un caractère blessant pour la profession. Cela revient à indiquer que les enseignants documentalistes ne sont pas des professeurs en tant que tels.
Récemment, une mesure spécifique aux documentalistes a été présentée en comité technique ministériel, l’indemnité de sujétion spéciale passerait, selon le projet d’arrêté, de 767,10€ à 1000€. Mais le sentiment de méconnaissance de leur métier demeure, il continue d’être tangible puisque cette prime ne leur permet pas de rattraper le décalage indemnitaire avec leurs collègues enseignants et qu’intervenir dans l’aide aux devoirs ne leur donne pas droit à la même rétribution, etc.
Les enseignants documentalistes, à la fois gestionnaires d’un centre de ressources et enseignants, ont certes un statut spécifique distinct de celui des professeurs classiques. Il n’en demeure pas moins qu’ils ont le même diplôme que leurs collègues. Surtout, les sciences de l’information sont leur discipline et ils pourraient être davantage exploités dans l’éducation
critique aux médias, un enseignement crucial pour transmettre les clefs de réflexion et aiguiser le sens critique des jeunes générations qui utilise quotidiennement les réseaux sociaux.
La formation et la pratique professionnelle des documentalistes les met naturellement au cœur de cet enseignement. Leur plus-value dans la formation des jeunes aux médias et à l’utilisation des réseaux sociaux, à la détection des fake news et au fact checking, ne serait pas à prouver. S’ils sont moteurs et force de proposition auprès de leurs collègues pour participer à ces apprentissages, ils sont exploités de manière très hétérogène au sein des établissements selon le bon vouloir ou les affinités.
Ainsi la problématique de la reconnaissance par l’Education Nationale des enseignants documentalistes va bien au-delà de la question leur revalorisation salariale. L’actualité autour des primes récemment accordées a fait émerger un malaise plus profond. Je souhaitais attirer votre attention, Monsieur le Ministre, sur le rôle qu’ils pourraient pleinement jouer dans
l’éducation à l’information, en lien avec leur circulaire de mission.
Un travail pourrait être mené sur ce sujet, pour réaffirmer leur place et leurs apports aux côtés du reste des équipes pédagogiques. Son intérêt serait double, à la fois vecteur de reconnaissance du statut des professeurs documentalistes et pédagogique en laissant plus de place aux sciences de l’information.
Vous remerciant par avance de vos avis sur ce sujet, je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, en l’assurance de ma très haute considération.
Sandrine Le Feur
Députée du Finistère